LA RTBF (notre service public) A LES MOYENS DE DIFFUSER SANS PUBLICITÉ nous explique Bernard Hennebert. Ce monsieur a demandé au Ministre des médias un rendez-vous pour répondre à ses questions (ci-dessous). Pas de nouvelles depuis 3 mois… (PARTIE 2 ET FIN)

3 : Les « pro publicité RTBF » : « Sans publicité (et donc sans l’audimat), vous allez imposer la culture au prime time.  Quasi plus personne ne regardera la RTBF. Vous n’êtes que des « bobos » qui ne veulent la télé que pour vous ». 

En fait, ce qui manque surtout en premier rideau, ce sont des émissions sociales au sens large (dont de vrais programmes d’information pour les consommateurs comme feu « Cartes sur table » ou « Autant savoir ») qui ont toujours été plébiscitées par le public, et particulièrement en temps de crise. 

La suppression de la pub peut même devenir un accélérateur d’audience car une majorité du public a de plus en plus horreur de celle-ci. Il existe un exemple concret de ce fait. « L’Hebdo »  (l’ancêtre de « Questions à la Une ») était diffusé à la fin du tunnel de pub qui suit le JT de 19H30 mais, pendant deux saisons, il prit place dans le corps même de ce JT, sans aucune interruption publicitaire donc (le générique de fin du JT de 19H30 était diffusé après le reportage de « L’Hebdo »). Cela se marqua par une augmentation moyenne de 100.000 téléspectateurs, chaque semaine.

L’évolution des programmes est rapide et flagrante au prime time de « La Une ». Au cours de la semaine de l’arrivée de Jean-Paul Philippot à la direction de la RTBF (mi février 2002) : on décompte cinq débuts de soirées (vers 20H15) sur la chaîne amirale avec des programmes plutôt sociaux/économiques, et deux consacrées au divertissement. Aujourd’hui, c’est l’inverse qui nous est programmé : deux (« Questions à la Une » et « le Jardin Extraordinaire ») et cinq (séries, films, humour, « The Voice », etc.). S’il faut bien entendu du divertissement, sa présence actuelle n’est-elle pas exagérée et ne se fait-elle pas au détriment d’autres missions, aux heures de grande audience sur les chaînes amirales, comme, par exemple, l’information et l’éducation permanente ? 

Estimez-vous que la suppression de la publicité avec ses conséquences sur l’évolution du contenu des programmes développera ou non, d’une part le nombre de ses auditeurs (audiences) et téléspectateurs, et d’autre part, le degré de satisfaction émis par ceux-ci concernant ces programmes (qualimat) ? 

4 : Les « pro publicité RTBF » : « Supprimer la publicité ne changera rien ! Comme le prouve l’exemple de France Télévisions où elle est interdite après 20H depuis 2009 ».

Le 8 janvier 2008, le jour même où le Président français Nicolas Sarkozy annonçait cette réforme, Marc Moulin indiquait dans un courriel qu’il ne croyait pas au succès de celle-ci car pas mal de responsables de France Télévisions étaient « génétiquement modifiés » et allaient se demander quoi faire d’autre que « de l’audience et de devenir connu ». De fait, de nombreux décideurs « accros » ont par la suite tout fait pour tenter que la pub revienne.

L’erreur (volontaire ou pas) du Président Nicolas Sarkozy, c’est qu’il n’a pas aussi supprimé le « sponsoring » après 20H. Celui-ci est encore plus pernicieux que la pub. Il pousse les chaînes à multiplier les « mini programmes » dont les thématiques et le contenu seront choisis pour pêcher de juteux « mécènes ». Ceux-ci se sont multipliés. 

En 2018, on est loin d’une annonce faite en 2008 : grâce à la suppression de la publicité après 20H, les programmes de la soirée commenceront plus tôt, vers 20H30. 

Sans publicité, ni sponsoring, France Télévisions aurait pu ne plus s’adresser au public le plus massifiant. Se différencier des diffuseurs privés revient, notamment, aux heures de forte audience, à s’adresser, de manière critique bien entendu, à d’importantes « minorités » : les téléspectateurs qui veulent de vraies émissions sociales ou politiques, les amateurs de culture, les sourds et malentendants, les enfants et les adolescents, le public « carte vermeille », etc. On aurait vu la différence ! Et avec moins d’émotionnel pour abreuver l’audimat.

Estimez-vous que si on supprime la publicité à la RTBF, on doit en faire de même avec le sponsoring ?

BERNARD HENNEBERT