JACK EST PARTI SE BATTRE ET A ÉTÉ BLESSÉ MAIS IL Y RETOURNE. QUEL EST LE SENS DE TOUT ÇA ?

Il a les cheveux courts, il a un look un peu militaire, ça doit être un facho !

Moi, la composante que j’ai proposée à l’armée ukrainienne et la Légion internationale – qui s’est mise en place – est un Corps franc. C’est un groupe de civils qui décide de prendre les armes pour aider une cause ou une autre sans pour autant être militarisé. En général sans avoir de hiérarchies au départ. C’est une initiative populaire totalement. Des Corps francs, il y en a eu en France, en Allemagne dans les républiques qui ont été annexées par l’URSS à l’époque. Il y en a eu beaucoup dans toute l’Europe. Un Corps franc c’est un Corps qui n’appartient pas à l’armée traditionnelle du pays en question.

J’ai appris par après qu’à l’époque, il avait été question de Corps francs wallons au moment de la Légion Wallonie qui est la composante collaborationniste des Wallons avec les nazis. Donc, Léon Degrelle est le type qui a fondé à l’époque le rexisme tout d’abord comme parti politique. C’est un parti royaliste fort catholique et très conservateur.

Une Légion c’est souvent une composante étrangère qui recrute un peu plus à l’aveuglette. Comme la Légion française ou la Légion étrangère, mais qui est militarisée. Le Corps franc lui, en général est rarement militarisé. Il y avait déjà des Corps francs alsaciens ou bourguignons à l’époque des empereurs Napoléon. Ils se battaient avec des armes et ils décidaient par exemple de venir renforcer certaines positions avec des gens qui n’avaient soit pas l’âge d’incorporer l’armée. C’était l’époque ou la conscription – l’appel obligatoire aux armes – n’existait pas.

Il y a des Corps francs anarchistes et il y en a d’ailleurs aujourd’hui à l’heure actuelle en Ukraine qui combattent.

La guerre a commencé en 2014 au Donbass. Le fait qu’elle se soit répandue sur une bonne partie du territoire date du mois passé [février 2022].

À la deuxième semaine du conflit, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a décidé de fonder une Légion internationale de défenses territoriales.

Je n’ai pas pensé tout de suite me lancer physiquement dans l’aventure parce que c’est quand même quelque chose d’assez physique. J’ai eu 52 ans. Je me suis dit que je pouvais faire quelque chose en arrière en aidant à traduire des textes par exemple. Aussi il y avait le risque que de jeunes personnes – et ça je l’ai vérifié – soient prises par l’euphorie, etc., et se retrouvent devant des scènes assez… qu’ils n’avaient pas imaginées. Quand moi, je suis parti à la frontière polonaise avec l’aide de personnes qui nous ont convoités, bin la moitié du contingent a directement quitté cette idée de rejoindre la Légion étrangère et le camp d’entrainement à Yavoriv qui a été bombardé quelques jours après. À cet endroit se donnaient les bases militaires pour ceux qui n’avaient pas de culture militaire ou d’expériences.

Il y a quand même pas mal d’aventuriers qui je crois s’emmerdent chez eux. Ça, c’est une première chose. D’autres qui vont au bout de leurs convictions et qui réagissent au pied levé plutôt que de devenir des « patates » comme certains de nos militaires qui coûtent très chères et ne voient jamais une zone de guerre.

C’est le côté un peu magique de la chose. J’ai vu des gens qui venaient de Singapour. J’en ai vu qui venaient de la Corée. Il y avait notamment 80 Japonais qui sont arrivés en car complètement déchaînés. Des petits secs à mon avis auxquels il ne fallait pas se frotter. Côté yakuza, samouraï, etc., assez efficace et guerrier quoi. Il y avait pas mal de Canadiens, d’Anglais. Beaucoup d’anglais quand même, j’étais assez surpris, mais ce sont toujours des chiens de guerre les Anglais. C’est culturel chez eux.

Dans la hiérarchie qui s’était mise en place pour faire la démonstration de certaines armes qui venaient du reste de l’Europe, il y avait quand même des militaires aguerris, voire pensionnés par l’armée de laquelle ils venaient. L’armée australienne, néo-Zélandaise… moi, j’ai compté 54 nations. L’idéologie qui prédominait c’était quand même de venir en aide aux civils avant tout. Peut-être à part certains Tchétchènes qui avaient rejoint le camp ukrainien sans être des mercenaires qui sont certainement de l’époque où la Tchétchénie a subi aussi les foudres de l’Empire soviétique sur sa fin.

Le côté humanitaire était fort possible déjà à la frontière avec des associations sur place et il y a l’envie de se battre, d’avoir une arme et de faire quelque chose de concret. Par exemple en défendant une école ou une vie humaine.

Je vais chercher un accomplissement dans ma vision de la liberté des peuples, de leurs droits à exister et à ne pas être écrasé par l’impérialisme, quel qu’il soit. Qu’il soit soviétique, poutiniste ou qu’il soit américain.

Je ne conçois pas qu’un peuple soit écrasé comme ça pour des raisons économiques qui échappent à la plupart des gens même aux militaires en général.

Je suis revenu parce que la caserne où nous étions a été bombardée et qu’il n’en reste rien…

JACQUES MARTIN DIT JACK AVEC XAVIER-GABRIEL

PHOTO : AUTEURE MARIE CURIE (1867- 1934) – LA RADIOLOGIE ET LA GUERRE – 1921 –