La RTBF (notre service public) A LES MOYENS DE DIFFUSER SANS PUBLICITÉ. C’est énorme vous allez me dire ? Impossible ? Déjà, il faut savoir que le directeur des radios – qui vient de RTL TVI – a un salaire plus élevé que le Premier Ministre belge. On s’écoute les arguments. (PARTIE 1)

1 : Les « pro publicité RTBF » : « Supprimer la pub à la RTBF, c’est la tuer financièrement ».
Une critique entendue régulièrement : « Avec cette demande de supprimer la publicité, vous, les utopistes irresponsables, vous voulez la faillite financière de la RTBF ? Vous êtes pire que ceux qui veulent petit à petit supprimer le service public… ».

En réponse à ce procès d’intention, voici un extrait de la carte blanche « RTBF sans pub: viable et vivifiant » publiée dans Le Soir du 15 juillet 2009 par Jean Cornil (alors député fédéral PS), Claire Scohier (Inter-Environnement), Jacques Liesenborghs (ex vice-président de la RTBF) et Bernard Hennebert (Consoloisirs) : 

« La pub coûte à la RTBF : sa recherche et sa mise à l’antenne ne sont pas gratuites! La RTBF devra également redéfinir ses missions, ses programmes et ses publics prioritaires. Il faudra donc estimer l’économie réalisée par la suppression d’émissions souvent coûteuses qui n’ont rien de « service public ». Pourquoi ne pas se demander également si la RTBF devra continuer de participer au financement du CIM dont l’objectif est de recueillir des données audimatiques souvent controversées afin de fixer la tarification publicitaire ? Il conviendrait aussi de proposer au niveau fédéral, une refiscalisation des investissements publicitaires au bénéfice de notre audiovisuel public, ce qui plairait assurément à la Communauté flamande qui manque de moyens pour la VRT. On ne voit pas très bien pour quels motifs démocratiques les investissements publicitaires qui avoisinent les 3% du PIB ne sont pas soumis à l’impôt ».

Ce texte énumère quatre sources de financements alternatifs ou d’économies à envisager en cas de suppression de la publicité pour permettre à la RTBF de continuer à vivre dans des conditions économiques sereines. Les considérez-vous comme des pistes intéressantes ? Pourriez-vous les budgétiser ?

2 : Les « pro publicité RTBF » : «  Jamais les citoyens ne seront d’accord pour compenser le manque à gagner causé par la suppression de l’apport publicitaire à la RTBF »
Quelques hommes politiques affirment qu’il est impossible de supprimer la publicité à la RTBF car le public ne voudra jamais compenser le manque à gagner qui en résulte. Mais constatez : jamais ils ne citent le chiffre de ce que cela coûtera.

Alors, calculons. La dotation annuelle de la RTBF est de 249 millions € pour la dotation. Celle-ci  revient par année à chaque citoyen de la Fédération Wallonie-Bruxelles environ à 47 €.
Ses recettes publicitaires sont de 74 millions € (dont 43,5 % pour la télé, 28,5% pour la radio, et le reste pour Internet).

La plupart des chiffres présentés ici viennent de Sudpresse. Son édition du 17 novembre 2017 consacra une page entière à un dossier réalisé par Charlotte Vanbever et Sam Christophe sur « La RTBF coûte-t-elle trop cher ou pas ? ».

Est-ce beaucoup ? Avec ces 47 €, la RTBF (avec publicités) revient aux citoyens moins cher que ce qui se passe dans bien d’autres pays ou régions, avec une exception : ce qui se passe en Flandre (43 €). Les petits pays comparable en Europe sont à une moyenne de 67 €. C’est bien plus élevé en France : 139 €.  Et, avant Brexit… 147 livres, soit 164 €, en Grande-Bretagne.

Donc, si on supprimait la publicité à la RTBF, la Fédération Wallonie-Bruxelles devrait la refinancer pour les 74 millions € manquants ? Non, pas exactement, car si on part de l’idée que nous sommes intelligents et que si on se passe des annonceurs, c’est justement pour supprimer et ne plus financer tous les programmes mis à l’antenne et qui ne correspondent pas vraiment aux priorités de service public, ce qui fera des économies non négligeables. 

Sans publicité, la RTBF se construira tout autrement et se métamorphosera. Bien entendu, si cette suppression est un préalable indispensable, il faudra également faire évoluer fortement le vieux dinosaure de notre paysage audiovisuel : y diminuer considérablement la bureaucratie, transformer la composition du conseil d’administration, revoir certains salaires élevés de la direction (proches ou même parfois plus élevés que celui du Premier Ministre), favoriser l’évolution de certaines mentalités.

Ne pas oublier dans le calcul de tenir compte des quatre propositions détaillées, ci-dessus, dans le point précédent (le point 1).

Partons dès lors du constat que les 74 millions € peuvent être ramenés ainsi de moitié, ce qui veut dire que chaque habitant, pour une RTBF sans pub, devrait pour contribuer aux 37 millions € manquants (s’il y avait une redevance) prévoir, chaque mois, l’équivalent d’un quart d’une tasse de café dans un bistrot pas cher.

Il resterait aux responsables politiques, puisque la Fédération Wallonie-Bruxelles ne peut lever d’impôt, à chercher d’autres moyens pour associer le public à ce projet. 

En Suisse, une « votation » récente demandait la privatisation de la SSR (société suisse de radiodiffusion et de télévision) dont la dotation coûte proportionnellement beaucoup plus cher aux habitants que celle de la RTBF chez nous. La leçon de ce « No Billag » du 4 mars 2018 est impressionnante : 71,6% des électeurs ont opté pour le maintien de la SSR, ce qui démontre que même si le service public a un coût, le public y est terriblement attaché et est prêt à faire des efforts financiers pour qu’il se développe.

En tenant compte de tous ces paramètres, souhaitez-vous qu’une étude de faisabilité plus précise soit entreprise ? 

BERNARD HENNEBERT – AUTEUR DES OUVRAGES – LA RTBF EST AUSSI LA NÔTRE – IL FAUT SAUVER LA RTBF – LA RTBF, LE DÉSAMOUR : CONSTATS ET PISTES D’ÉVOLUTION –

ILLUSTRATION : FRANÇOIS HUBERT