QUAND TU LANCES UN PROJET AVEC LES ABEILLES ET QU’ELLES SE FONT BUTER PAR DES HUMAINS ET LEURS PESTICIDES. IL FAUT VRAIMENT QUE ÇA S’ARRÊTE. MAIS COMMENT FAIRE ?

On est sur 3 hectares ici et tout autour de nous, il y a des terres agricoles avec une agriculture conventionnelle. C’est-à-dire avec tous les pesticides et dernièrement, ils ont pulvérisé leurs champs et le résultat est que…ben…la plupart de nos abeilles ne reviennent même pas jusqu’à la ruche. Elles meurent sur le trajet. Donc, elles ne peuvent plus nourrir leurs petits et donc, tout meurt. Il n’y a pas de miel. Notre apiculteur est obligé de donner du sucre pour nourrir les bébés et c’est vraiment une catastrophe. Il est là tous les jours jusqu’à des fois 23h00…Il est vraiment désemparé de voir qu’en essayant de faire son maximum et en donnant le meilleur et bien on n’y arrive pas, on est toujours bloqué avec tous ces parasites autour de nous.

Ces gens sont là depuis des générations et des générations et des générations et ils nous voient arriver comme – j’ai envie de dire avec des guillemets – , « des petits bobos » urbains qui viennent planter leurs carottes bio et mettrent 3 ruches d’abeilles parce qu’ils ont vu sur les réseaux sociaux qu’il n’y avait plus d’abeilles dans le monde. – « Oh mon Dieu, scandale ! » C’est pas ça. C’est pas ça du tout. On essaye de faire quelque chose de bien. On respecte leur travail parce qu’effectivement, ils étaient là, avant nous. Ils ont été forcés à travailler comme ça parce que les règles actuelles sont juste infernales pour ces gens-là aussi. Ils doivent faire du travail de masse pour avoir des revenus à la fin du compte : misérables. D’ailleurs, il n’y a pas mal de suicides dans le milieu de l’agriculture. C’est bien connu. Ce n’est pas pour rien.

Si nos terres ne sont pas polluées, nos abeilles, elles, elles vont butiner sur les terres empoisonnées et fatalement cela pose un problème.

Mais nous on meurt [aussi] un peu. En voyant les abeilles qui meurent si on regarde le problème dans le fond… Si les abeilles meurent alors qu’elles vont butiner le blé, comment est-ce possible que nous qui mangeons ce pain n’allons pas clairement un peu mourir. C’est ça mon appel au secours. Essayons tous de prendre conscience qu’il faut faire quelque chose pour que ça change. Déjà, parlons-en.

Je pense que nous le combat que l’on peut mener à notre échelle, c’est déjà de s’accrocher, de ne pas lâcher ce que l’on fait. Des fois, on a envie de dire : « Mais t’sé quoi, moi je laisse tomber. » C’est juste pas possible. On est seul. Ne pas se décourager est une forme de combat. Se faire entendre est une forme de combat où on commence un peu à prendre les armes. La parole ça peut être une arme. Chercher à connaître, à comprendre… Je pense que ne pas lâcher c’est une forme de combat et c’est ce que l’on peut faire « nous » à notre échelle. Parce qu’effectivement, je ne me vois pas aller au créneau contre Monsanto, contre Roundup et tous leurs copains. Je perdrais clairement. Je perds déjà.

AUDREY ET FRANCK