« CE N’EST PAS DE LA DÉSOBÉISSANCE CIVILE CE QUE JE TENTE DE FAIRE MAIS DE RAMENER LA LÉGALITÉ DANS UN PAYS DÉMOCRATIQUE. »

Je pense que l’on ne choisit pas son karma. Je pense que l’on vit ce que l’on reçoit, ce qu’on échange, ce qu’on partage. Ça s’appelle la culture en fait. Ça s’appelle la vie. Ça s’appelle la découverte. Ça s’appelle la curiosité.

J’ai 43 ans. Je joue de la musique depuis l’âge de 5 ans. Professionnellement ça fait 25 ans que je travaille. 25 ans que j’écume les scènes, que je vis de ma production musicale. Que je joue de la guitare. Que je collabore avec des artistes dans tous les sens : le jazz, la musique classique. Qui ne sont peut-être pas de grands mainstreams on va dire au niveau des canevas et des castes qui sont promotionnés par les médias, mais où nous avons du travail. Et donc, j’étais quelqu’un qui depuis des années était sans doute connu d’un certain public que l’on pourrait nommer « cultureux ».

Je pense que la force, l’esprit et la musique se racontent aussi en liberté.

Comme beaucoup d’artistes, on en a marre d’être trainés dans la boue. D’être ignorés. On en a marre d’être sous ce joug absolument ignoble d’une communication gouvernementale qui ne cherche pas la bienveillance envers le monde artistique.

Quand j’ai appris simplement que les églises pouvaientt accueillir des messes avec 15 personnes et un prêtre, je me suis dit : « Ah, ben c’est évident, super ! ». Je vais pouvoir remplacer le prêtre et aller faire de la guitare à la place puisque c’est ce que je fais depuis ma plus tendre enfance.

Et bien, moi, je n’y ai pas droit. Non, ça m’est interdit. C’est simple ma religion, c’est la musique. J’en ai fait mon chemin de croix.

Oui, j’ai des amis curés. J’ai beaucoup d’appréciations de ce monde-là parce qu’il fait partie de mon histoire familiale. J’ai eu beaucoup, beaucoup de plaisir à rigoler avec ce monde et par ailleurs mon père ayant été un homme de loi, j’ai aussi des connexions avec le monde des avocats et de l’Autorité fédérale au niveau des procureurs, etc.

Donc, ça m’a permis d’abattre des peurs. Des peurs que beaucoup de citoyens emmagasinent au fur et à mesure de cette crise. Pour ma part, plutôt que de m’enfoncer dans cette peur, j’ai toujours posé les questions aux gens que ça concernait. C’est-à-dire : est-ce qu’il y a moyen de se dire que nous vivons dans une démocratie malgré cet état d’urgence et que cette démocratie c’est un outil. Et que c’est à nous, d’ouvrir les tiroirs pour déclipser, pour éteindre les peurs.

Je ne suis qu’un lanceur d’alerte. Certains ont dit : un détonateur. Un allumeur de mèche. En tout cas, j’ai vraiment profondément assumé l’idée de ne pas avoir peur de mettre mon doigt dans l’engrenage et de le maintenir pour le gripper. C’est ce qui en train de se passer. Ça fait bouger le Parlement, bouger les parlementaires. Ça fait des interpellations à la ministre de l’Intérieur qui est très mal à l’aise et qui ne sait plus trop quoi répondre par rapport à cette soi-disant légalité d’un état d’urgence.

C’est ça qui est intéressant. Peu importe que votre musique soit plus audible dans une église, que vous soyez copain avec les curés ou avec un procureur. Ce qui est intéressant, c’est le cheminement.

La Ligue des droits humains que j’ai rejointe, va faire tomber certainement un jugement qui va faire grand bruit dans la foulée. Nous en serons un peu plus le vendredi qui arrive. Le vendredi 12 [mars 2021]. C’est tout cet amas de choses qu’il faut clarifier.

Vendredi prochain, je refais un concert. Je recommence non plus dans une église, mais dans une institution culturelle subventionnée.

La culture n’existe pas pour le Comité de concertation du vendredi 5 mars [2021]. Il faut revenir à un État de droit. Cette action en justice va peut-être faire bouger davantage les lignes politiques mais aussi au niveau de la justice, du Parlement qui doit reprendre en main les débats, qui doit reprendre en main ce qu’on appelle la démocratie.

QUENTIN DUJARDIN

PHOTO: PIERRE SCHONBRODT – QUENTIN DUJARDIN LORS DE SON CONCERT DANS UNE ÉGLISE LE 14 FÉVRIER 2021 À CRUPET ET ARRÊTÉ PAR LA POLICE –

NOUS VOUS PROPOSONS D’ALLUMER VOS BOUGIES TOUTE LA JOURNÉE EN SOUTIEN AUX AVOCATS QUI PLAIDERONT CE VENDREDI 12 MARS 2021 MATIN DEVANT LE TRIUNAL DE 1ÈRE INSTANCE DE BRUXELLES. ILS/ELLES SE BATTRONT ENSEMBLE FACE À L’ÉTAT BELGE POUR REDONNER VIE À NOTRE DÉMOCRATIE.