LA DÉSOBÉISANCE, LE SABOTAGE, LA RÉSISTANCE…ET LA VIOLENCE. Jusqu’où sommes nous prêts à aller pour défendre nos idées ? Rencontre avec BENJAMIN HENNOT qui nous rappelle que les luttes sont faites (aussi) avec des armes à feu.

Quel est l’état d’esprit qui fait que tu oses lutter contre un État totalitaire ?

Quels sont les moyens populaires de se défendre contre des pouvoirs injustes ?

On est dans une époque où ce qui domine dans les mentalités, c’est le victimisme depuis 45 ans. Ce sont les historiens qui le disent. On ne parle que des victimes. Surtout sur la Deuxième Guerre mondiale. Au lendemain de la Seconde Guerre, on parlait des guerriers. D’ailleurs la production cinématrographique au sortir de la guerre, c’est quoi ? C’est la bataille du rail où les cheminots français reconstituent tous les coups d’éclats qu’ils font contre les nazis. Donc, c’est joyeux, c’est actif. On célèbre des guerriers, des mecs qui ont pris des risques…

Moi, je reprends cette tradition là. Je célèbre des guerriers. Parce que ce n’est pas en célébrant des victimes, que l’on change le rapport de force. On peut dénoncer une situation qui est injuste en montrant des victimes. Mais une victime qui ne réagit pas, ne change pas le rapport de force. À la limite, elle l’accepte. C’est une culture générale. C’est plus qu’une idéologie, c’est une mentalité. C’est une évidence. On interroge une victime comme cela, on est sûr de ne pas se tromper. C’est comme donner de l’argent à une ONG, tu es sûr de ne pas te tromper. En fait, tu te trompes lourdement parce que tu enrichis l’argent de l’ONG et généralement très peu les gens que tu veux aider et de toute façon, tu ne les aides pas structurellement.

C’est bien de négocier mais si tu n’as pas une menace derrière, tu n’as rien. S’interdire une partie de la gamme de la palette de la lutte mais tu es certain de perdre…et en face, ils vont te rire au nez.

Les gens ne se rendent pas compte à quel point, ils s’auto-méprisent. C’est-à-dire qu’ils disent : non, moi, une arme, jamais parce que c’est dangereux. Donc, tu ne te sens pas assez responsable pour avoir une arme. Par contre, tu croises des flics et des militaires qui sont dix fois plus cons que toi (moins d’études, etc…) cela ne te pose pas de problème. Donc, les mecs qui font de longues études sont des irresponsables dans le fond. Comme des enfants à qui on ne donne pas des allumettes par peur qu’ils mettent le feu à la maison. Ben, c’est le même raisonnement. Les citoyens, on ne leur donne pas des armes parce que sinon, ils vont s’entretuer comme dans le film de Michaël Moore.

Nous soutenons la guerre avec nos impôts. Il faut arrêter de dire : je suis contre la guerre. Nous soutenons la guerre. Nous payons les soldats. Je suis évidemment contre ça mais c’est un fait. Notre société est défendue par des gens armés, par des armes et lourdement et en plus c’est nous qui les payons. Les gens qui disent : je suis contre les armes, ils me font juste marrer.

Et quand il y a des attentats ? Alors, là, c’est marrant car quand il y a des attentats, les gens ils se réfugient immédiatement derrière les flics. Si nous voulons un monde de paix, un monde sans les armes et bien quand il faudra se défendre, nous nous réfugierons derrière les mecs qui nous défendent. Et pour l’instant, ce sont les plus cons. Ce sont les mecs de droite, les bijoutiers, les fermiers, les militaires et les flics. C’est tout ce que nous n’aimons pas. Il faut savoir ce que l’on veut dans la vie. Bien sûr, j’essaye avec les gens autour de moi d’avoir des rapports non-violents. Mes voisins, mes amis, etc. Je préfère régler tout avec des petits arrangements. Il n’ y a pas de problème. Mais si tu ouvres les yeux et si tu quittes ta zone de confort qui est l’Occident qui n’est plus très confortable puisque l’on s’est fait un petit peu attaquer – il y a eu des attentats et on nous livre une guerre asymétrique – et bien tu te rends compte que oui, la guerre, il faut souvent la faire.

André et Marcel, ils ont fait la guerre contre les nazis qui ne partageaient pas leurs valeurs. Et, ils l’ont bien fait. C’était une guerre de libération. Ils l’ont fait en évitant de tuer des innocents. En évitant qu’il y ait des représailles sur la population. Ils ont fait une guerre éthique. Et ils ont fait surtout du sabotage. Parce que le sabotage, tue moins de gens et ça, c’est vraiment génial. Et je les compare dans le film avec l’armée, les militaires. Quand André et Marcel voulaient détruire une locomotive, ils entraient dans la gare. Ils montaient dans la locomotive et ils disaient : hey, détache ta locomotive ! Ils arrivaient en rase campagne et ils faisaient descendre tout le monde. Puis, ils pétaient la locomotive en serrant la main des machinots.

Les militaires quand ils voulaient détruire une locomotive, ils bombardaient la gare où il y avait des locomotives. Et bien, toute la ville (je suis originaire de Tournai) fut rasée. Il y eut : 300 morts. Des civils, des femmes, des enfants sous les décombres. Alors, la question est : est-ce qu’il y avait moyen de faire autrement ? Ben oui, mais contre les nazis, on répond (souvent) qu’on ne pouvait pas faire d’omelettes sans casser des oeufs. 12. 000 civils tués (en Belgique) par l’aviation américaine. Ils étaient vraiment obligés ? Pourquoi, ils n’ont pas armé correctement tous les maquisards qui eux, travaillaient proprement ? Ils auraient pu les armer mais ils ne les ont pas armés parce qu’ils se méfiaient des civils et mieux vaut buter plein de civils que d’armer les communistes. Voilà, c’était ça, la logique politicarde des États. C’est pour ça que c’est important de s’intéresser à tous ces phénomènes.

BENJAMIN HENNOT – DOCUMENTAIRES : STAN ET ULYSSE, L’ESPRIT INVENTIF + LA BATAILLE DE L’EAU NOIRE +  LA JUNGLE ÉTROITE –