RENCONTRE AVEC UNE DÉPUTÉE EUROPÉENNE AU PARC LÉOPOLD.

Je me suis rendue compte en fait que je voulais être sur le banc des décideurs parce que je suis souvent révoltée par des décisions que je n’estime pas bonnes et qu’en fonction de la position qu’on occupe, on peut ou pas l’exprimer.

Je me sens porte-parole finalement des acteurs du terrain et je fais en sorte aussi quand j’ai des dossiers de rencontrer ces acteurs de terrain. De travailler avec le secteur associatif avec les lobbys mais les « bons » lobbys en tous les cas ceux que j’estime être bons parce qu’il y a aussi les lobbys qui ne voient que les intérêts économiques ou les intérêts de leur secteur avant tout. Moi, je suis dans une logique d’intérêts sociétaux. Essayer de travailler le bien commun et de faire avec les acteurs de terrain parce que je n’ai pas toute l’expertise.

Je siège dans deux commissions : celle du commerce international et celle des libertés civiles, justice, affaires étrangères et migrations.

On entend quand même de plus en plus de voix citoyennes qui s’élèvent contre les accords de libre-échange tels qu’ils existent aujourd’hui. Le dernier en date dont on parle est celui avec les pays du Mercosur, 4 pays d’Amérique latine. Cet accord date d’un autre âge. Il a été négocié depuis 20 ans quand les enjeux climatiques n’étaient pas sur la table. Quand on parlait à peine des effets sociaux de nos politiques économiques. Les travailleurs en bout de chaîne et le non-respect des droits des travailleurs, des syndicaux, les droits à un salaire décent. Tout ça, il en était très peu question il y a 20 ans. Le mandat de négociations sur lequel se base la Commission européenne pour conclure un accord aujourd’hui en 2021 date d’il y a 20 ans.

Entre-temps, il y a le Pacte vert européen qui établit les objectifs climatiques en ligne avec l’accord de Paris sur le climat, toutes les conventions de l’OIT (Organisation Internationale du travail). On a des rapports d’experts d’organisations internationales, d’Amnesty, Human Rights Watch qui révèlent toutes les violations des droits fondamentaux des gens. Et c’est ce que je veux dire, tout ça n’a pas été intégré de manière suffisante et on ne peut pas continuer à investir et à faciliter les relations économiques, à faire tomber des barrières tarifaires si nos investissements contribuent à la déforestation de l’Amazonie, à la violation des droits des travailleurs, à l’utilisation massive de pesticides qui sont utilisés dans les pays du Mercosur mais interdits en Europe. On interdit (à juste titre) aux producteurs européens et aux agriculteurs d’utiliser certains pesticides mais par contre, on va pouvoir importer des produits sur le marché européen qui eux ont été produits avec des pesticides. C’est un monde qui marche à l’envers.

Très souvent quand on parle de l’Europe, c’est de ses échecs ou du fait que ça ne fonctionne pas. Très souvent quand une politique fonctionne les États membres se l’attribuent même si au départ il s’agit d’une démarche européenne. Ça, c’est le paradoxe et dans la communication aussi, dans le relais médiatique qui est fait des dossiers.

L’Europe c’est une organisation à 27 pays et il faut faire attention à ne pas penser que ce sont des décisions prisent ailleurs (hors sol] que chez nous puisque ce sont nos gouvernements qui vont les prendre…

SASKIA BRIQUMONT

ILLUSTRATION : CARTE DU MONDE – AUTEUR – VISSCHER NICOLAES [1649-1702] – http://hdl.loc.gov/loc.wdl/dlc.179